L’épidémie d’Ebola

10 septembre 2014

Ébola
Source: Istock

L’épidémie d’Ebola en Afrique: chronique d’un désastre annoncé.

Depuis quelques semaines, les cris d’alarme se succèdent sur la scène internationale pour nous rappeler que plusieurs pays africains sont aux prises avec la pire épidémie d’Ebola jamais survenue. Joanne Liu, présidente de Médecins sans frontières (MSF), déclarait le 2 septembre à l’ONU que cette épidémie devenait incontrôlable. Pourtant, tout était prévisible, mais c’est si loin l’Afrique !

Le 6 septembre, les statistiques dénombraient 2097 morts sur 3,944 cas connus. Les femmes, soignantes naturelles, sont plus touchées que les hommes. Les morts se concentrent surtout dans trois pays : la Guinée, le Libéria, la Sierra Leone. Dans une moindre mesure, le Nigeria est atteint. Quelques cas ont été également trouvés en au Sénégal. Quant à la République démocratique du Congo, il s’agit d’une autre souche virale. L’OMS estime qu’au moins 20,000 personnes seront atteintes et qu’il prendra encore 6-9 mois pour juguler l’épidémie.

Le virus est extrêmement agressif et la mortalité de 50% à 90% dans ces conditions sanitaires. Il n’y a pas encore de vaccin. Il semble toutefois y avoir des avancées en ce sens. The Economist rapporte qu’une centaine de soignants sont décédés par manque de gants et autres mesures protectrices. L’ONG Action pour la faim a même dénoncé le manque d’eau de Javel ! Dans les circonstances, les professionnels du monde entier (médecins et infirmiers) ne se bousculent pas aux portes. L’OMS réclame des fonds pour des incitatifs financiers pour les soignants locaux qui souvent ne voient pas la couleur d’un chèque de paie.

Les scènes dramatiques d’un patient qui se sauve de l’hôpital ou encore de survivants exclus de leur village mettent un visage humain sur toutes ces statistiques. MSF déclarait que faute de places dans les centres de soins surpeuplés, les malades mourraient chez eux et qu’ « En Sierra Leone, les cadavres, hautement infectieux, pourrissent dans les rues. » On ne voit pas cela dans les médias. Les frontières sont fermées et les vols aériens cessés. Bref, c’est la quarantaine.

En 2000, j’accomplissais mon premier voyage professionnel en Afrique : au Burkina Faso et au Sénégal. J’ai eu l’occasion de visiter plusieurs installations de soins de santé : hôpitaux, léproserie, dispensaires de village. Quel choc ! Le manque si indécent de moyens. La malpropreté des lieux. Des villages sans puits d’eau potable. La prévalence de paludisme mortel et du sida. Je me souviens encore d’une jeune infirmière enceinte au Burkina. Quelques mois plus tard, j’ai demandé des nouvelles de sa grossesse et on m’a informée qu’elle était morte en couche. J’étais sidérée. Il est notoire que les infrastructures sanitaires sont minimales, insuffisantes, voire inexistantes dans ces pays. Quand je suis revenue de ce voyage, je n’avais de cesse de penser que tôt ou tard les pays développés paieraient cher leur indifférence.

La Banque Mondiale a promis 200 millions de dollars et la Commission européenne 140 millions d’euros. Les États-Unis enverront des militaires. Le Canada a installé un laboratoire mobile en Sierra Leone. Mais on sait bien que ce sont des mesures ad hoc probablement insuffisantes et sans effet à long terme. On est revenu au temps du choléra et de la peste dans ces pays. La Sierra Leone imposera le confinement à domicile de toute la population pendant trois jours, du 19 au 21 septembre ! Après cette crise, ces pays seront encore plus pauvres et les orphelins plus nombreux.

Il nous faut quand même faire preuve de réalisme, à l’ère de la circulation intensive au plan international, les bactéries et virus voyagent. Dans les pays pauvres, la proximité avec les animaux et le manque d’investissements dans les mesures de santé publiques créent des conditions favorables à de nouveaux virus et leur propagation. Ça n’existe plus une maladie africaine ! Le sous-développement s’avère un terreau fertile à l’apparition d’épidémies mondiales.

Catégorie(s): Épidémie Ébola

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