Les grands défis des OBNL

16 février 2015

obnl

De gauche à droite : Élaine Barsalou, Banque Scotia; Gyslaine Desrosiers; Stéphane Vaillancourt, pdg YMCA; Anne-Marie Poitras, Desjardins Entreprises Capital; Eddie Leschiutta, Deloitte.

Les grands défis des OBNL 

Le 4 février, se tenait à Montréal le colloque annuel « Forum OBNL 2015 » organisé par l’Institut des administrateurs de sociétés (IAS), section du Québec (http://www.iasquebec.com/calendrier-annuel.php?eid=47). Paneliste invitée, j’ai eu le privilège de présenter ma vision à la séance plénière sur les défis de la gouvernance de ces organismes.

La nature des activités des OBNL est très diversifiée : fondations caritatives, fondations en lien avec les maladies, associations professionnelles, groupes d’affaires, groupes de pression en environnement, organismes communautaires, etc….. On est porté à les réduire aux organismes caritatifs alors que plusieurs grandes institutions sont à buts non-lucratifs. En fait, les organismes qui doivent assurer leur financement sans l’aide de l’état ont une cause, une mission, des services à vendre en quelque sorte. Ils doivent donc faire preuve de la même créativité, la même rigueur que les entreprises privées.

On sait que la multiplication des OBNL crée de facto une compétition féroce sur les levées de fonds. Il a été mentionné durant le Forum que des fusions, des partenariats ou des partages de services sont des avenues qui auraient avantage à être explorées par les OBNL.

L’argent, le nerf de la guerre.

La situation des OBNL ne peut être analysée globalement : certains gèrent des millions, d’autres sont de petits organismes communautaires. Toutefois, les dix prochaines années s’annoncent difficiles pour ceux qui recevaient des subventions étatiques ou qui se financent entièrement avec des levées de fonds. Les gouvernements réduisent toutes les subventions et les activités philanthropiques sont en forte concurrence.

Stéphane Vaillancourt, pdg des YMCA du Québec, a dénoncé le principe à l’effet qu’un « bon OBNL » est celui qui a les frais administratifs les plus bas, sans égard à la concurrence sur le marché pour le recrutement des meilleurs talents.

Les sources de revenus visent habituellement à assurer le fonctionnement courant de l’organisme et on oublie de dégager des fonds ou de faire des réserves pour les projets éventuels de restructuration, de modernisation ou même d’immobilisation.

Les OBNL se font parfois piéger par des consultants ou des fournisseurs de services qui suggèrent ou implantent des produits ou services adaptés à de grosses entreprises ou qui requièrent un entretien coûteux. Les OBNL n’ont pas une grande marge de manoeuvre financière et présentent une plus grande vulnérabilité. L’exemple des produits et services informatiques et web est très critique à cet égard.

Mythes et réalité

La gestion d’un OBNL est-elle compatible avec les pratiques usuelles du monde des affaires?

Tous les panelistes ont insisté sur la capacité d’innovation. L’OBNL doit pouvoir renouveler son image de marque (branding), son positionnement et répondre aux défis technologiques. Les développements web, la vigie et la présence sur les médias sociaux, le paiement en ligne requièrent des nouveaux talents et des mises à jour des plates-formes technologiques. Cela peut entrainer une vulnérabilité face à des fournisseurs gourmands ou malavisés.

Le Forum a mis en évidence l’importance de l’agilité organisationnelle. On a même mentionné le passage d’une « gouvernance de conformité » à une «  gouvernance stratégique ». Cela implique le défi d’attirer et de retenir les meilleurs talents.
À cet égard, le bénévolat qui prévaut beaucoup dans les OBNL n’est pas nécessairement une garantie de compétences. Il semble toutefois que la diversité de compétences au conseil d’administration peut aider l’organisme à accéder à des services professionnels de haut niveau pro bono. L’implication directe de certains membres du CA dans des projets différencie les OBNL de l’entreprise privée où il n’y a pas de perméabilité entre l’appareil de gestion et la gouvernance.

Personnellement, j’estime que si les règles de transparence et de performance s’appliquent aux OBNL, celles relatives à la gouvernance auraient avantage à être allégées. Il est difficile pour un petit OBNL de mettre sur pied les multiples comités du conseil, d’autant que parfois, ils ne peuvent se permettre une équipe de direction complète. Il faut attirer au conseil des personnes non seulement intéressées par la cause, mais qui offrent des compétences variées.

Perspectives d’avenir

Les modifications démographiques vont marquer l’avenir des OBNL, surtout celles à caractère caritatif. À mon avis, le retrait des baby-boomers du marché du travail va créer deux tendances en opposition : d’une part, les baby-boomers constitueront un bassin important de recrutement pour les conseils qui précédemment, n’avaient pas les moyens de se payer des compétences de pointe dans leur équipe de direction. Il leur faudra être assez habiles pour capter leur attention et les attirer. D’autre part, la clientèle-cible des OBNL issue des générations XYZ risque d’être moins intéressée par les « nobles causes » surtout, si leur marketing est davantage adapté aux générations précédentes.

De façon plus générale, la tendance à l’austérité et à des politiques de droite créera de fortes pressions sur les OBNL qui occupent des créneaux où l’état se désengage. La viabilité du modèle financier de chaque OBNL doit faire l’objet d’une révision aux cinq ans. L’évaluation de la performance et la gestion des risques sont au cœur de la gouvernance des OBNL.

À l’instar de toutes les entreprises, les OBNL sont sensibles à la situation économique et leur pérennité n’est jamais assurée.

Catégorie(s): GouvernanceOBNL
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